Blablas de toutes sortes

Quand l’instant présent est source d’angoisse

Vivre l’instant présent, Carpe Diem, profiter de chaque moment pleinement et en toute conscience etc… Toutes ces phrases dont on nous serine les oreilles à longueur de temps. Dans l’absolu je suis pour cette philosophie même si parfois elle m’est difficile à appliquer. C’est vrai que le passé porte bien son nom, il est passé. Le futur n’existe pas encore donc pourquoi se projeter sans qu’on ne le connaisse et se faire des cheveux blancs avant l’heure. Il ne reste plus que le moment présent à savourer effectivement. Il se peut que je l’aie mal appliqué, mal compris à certaines périodes mais il a été et est encore parfois source d’angoisse de mon côté. Je n’arrive pas trop à savoir si c’est le fait d’entendre parler de lui sans arrêt pour notre bien-être mental un peu comme si en n’y arrivant pas forcément, je n’arriverais jamais à trouver une certaine sérénité ou si l’angoisse est plus profonde et réveille des craintes enfouies.

Ou alors j’ai réalisé davantage l’importance du moment présent à vivre et j’en ai été remuée en ne sachant pas trop comment le gérer finalement, parce que c’était « nouveau » que je tente autant de vivre l’instant présent. Je me suis demandée si j’étais seule dans ce cas par contre, d’où mon post. Qui arrive à être dans le moment présent réellement ? Et constamment pour ne pas se laisser emporter par des pensées parasites où le passé ou le futur intervient ? Qui parvient à être serein.e grâce à cette philosophie de vie puisque je le perçois vraiment ainsi. Est-ce que je m’y prends mal, dans le sens où je passe à côté de la pratique de cette notion là ? Bref Carpe Diem est source de questionnement pour ma part.

La première fois que l’angoisse est montée, c’est quand j’ai appris le cancer de ma Happy. C’était une épreuve à vivre de savoir qu’elle était condamnée et que l’issue serait fatale, sans savoir quand. Elle pouvait rester avec moi encore 2 semaines si tout s’enflammait très vite ou plusieurs mois si l’évolution se stabilisait. Et je me suis promis de profiter de chaque moment avec elle, comme si c’était le dernier. Ce que j’ai fait bien sûr, comme dans d’autres situations avec mes proches par exemple quand je suis en leur présence. La certitude de savoir qu’il ne restait plus longtemps avec elle a provoqué à elle seule une grosse angoisse. Chaque soir je me couchais en me demandant si j’avais justement assez profité d’elle, si je l’avais assez câlinée, assez répété que je l’aimais tellement, assez pris soin d’elle. Et je me disais « un jour de moins avec elle » et ça me déchirait le coeur… Et c’est là que le moment présent a été source d’angoisse. J’avais la sensation de m’étouffer à vouloir arrêter le temps et finalement je me demandais si j’en profitais réellement de ce moment présent puisque finalement j’étais dans le futur, j’entrevoyais ma vie sans elle. Mais c’est devenu une course, il m’arrivait de me relever la nuit juste pour être avec elle pour ne rien gâcher de mes moments avec elle et je sentais une oppression. Puis j’ai oublié à un moment qu’elle avait ce cancer, parce qu’elle allait bien, rien ne se voyait, alors j’ai relâché un peu. Et c’est revenu plus fort, j’avais besoin de chaque minute avec elle et tout moment qui passait était terrible à gérer (je réalise à quel point c’est difficile d’expliquer cette sensation, en écrivant par contre). J’en voulais aux secondes de s’écouler, aux minutes de la voir s’échapper de moi davantage et aux heures de filer si vite. Et chaque soir le même constat. Est-ce que j’avais vraiment profiter du moment présent avec elle et est-ce que je pouvais faire encore mieux le lendemain. Puis elle est partie, ma précieuse minette… 1 mois est passé. Mes parents sont venus en vacances dans notre région, je leur avais trouvé un airbnb à 2 rues de chez nous, c’était agréable de les voir arriver et repartir à pieds. Et l’angoisse du moment présent à absolument savourer sans laisser de pensées parasites venant du passé ou du futur intervenir est revenue. Chaque bout de balade qu’on faisait était déjà passé dans ma tête alors que je tentais de vivre le moment présent mais ça me retournait les boyaux de voir s’échapper les heures avec eux. C’est quelque chose qui m’a sûrement permis de vraiment prendre tout le temps dont je disposais avec eux, d’un côté mais d’un autre côté, je me sentais à bout de souffle et il se peut que je n’aie en plus pas écouté mon corps qui lançait des signaux de détresse tellement je tirais sur lui. Pour ne pas perdre une miette. Ils venaient manger chez nous le soir, à chaque fois qu’ils repartaient, je leur faisais un signe par la fenêtre, je voyais leurs grands sourires. Je ne ratais pas une seconde. Quand leurs têtes disparaissaient derrière le coin de notre rue, je regardais encore pour voir si je ne percevais pas encore un bout d’eux que j’aurais peut-être raté et donc gâché. A nouveau une course.

Puis c’est nous qui sommes partis une semaine dans mon Alsace natale. Nous avions loué un airbnb et mes parents nous rejoignaient dans les sorties qu’on faisait. J’ai eu le malheur de ne pas être en état d’en faire une, un jour. Je voyais s’effilocher le temps précieux que j’aurais pu passer avec eux, l’opportunité de les avoir avec moi qui s’envolait. Au-delà de la déception, il y avait cette douleur de me dire « ce temps ne se rattrapera plus jamais ». Puis les autres sorties se sont toutes soldées ainsi. Avec une boule au ventre de me dire que je ne les aurai pas toujours avec moi, eux non plus et que toute seconde était comptée. Et est-ce que j’avais réellement bien profité de chaque moment avec eux. Est-ce que j’avais fait assez ? Est-ce que je n’aurais pas pu faire mieux encore pour mieux vivre ces moments-là. Ca m’oppressait au point de ne plus vouloir les laisser repartir. Un soir, mon papa m’a serrée fort, on avait partagé encore une super journée tous ensemble et il m’a dit « halala qu’est ce qu’on a bien ri, encore une belle journée » en ajoutant qu’il m’aimait et ça a augmenté ma souffrance du moment présent qui passe trop vite et qui ne revient plus justement… jusqu’au jour où il n’y en aura plus de ces moments…

J’ai fini par réaliser que chaque moment présent partagé menait à une fin. A la mort de ceux que j’aime. C’est le point commun. Et une angoisse de plus en plus présente. Depuis le covid, depuis le 1er confinement, la peur de la mort de ceux que j’aime est devenue terrible à gérer. Alors parfois j’ai besoin de me rappeler du passé pour me dire qu’après les Carpe Diem, il y a une case « beaux souvenirs » dans notre cerveau qui prolonge les moments présents qu’on vit. Ca m’aide à gérer mes instants présents, étrangement. Sinon je ressens vite cette boule au creux du ventre. Penser à la disparition un jour de mes proches comme ma Happy s’est envolée est déjà le futur et j’ai espoir qu’un jour, cette pensée là s’efface pour ne pas venir perturber le moment présent à vouloir vivre absolument de façon viscérale et étouffante.

Vous arrivez à être complètement dans le moment présent ? Sans que ça ne dévie de trop, parce que je me doute qu’il n’est pas constant cet état d’esprit. Celui de rester ancré.e dans le présent. Sans passé et sans futur.

Moments de bonheurs et d'évasion

Pouvoirs et doutes d’une nouvelle relation – Fibromyalgie et post-abus

C’est une peinture à huile qui fait partie de la maison où on va en vacances, toute la famille réunie. J’ai tellement envié ce couple au bord de l’eau… C’était en août dernier. La vie a fait de sacrées surprises peu de temps après.

Je mentirais si je ne sentais pas plus de vie en moi que depuis qu’il est entré dans ma vie. Il me donne la force de dépasser les limites de mon corps juste pour être avec lui, seul ou avec ses enfants. Je suis obligée de me reposer pendant 3 jours pour récupérer un peu ensuite parce que je fatigue vite, mais avec les souvenirs des bons moments passés, en arrière-plan. J’ai envie de me faire jolie et même quand je n’aime pas mon reflet dans le miroir, ses yeux me font changer d’avis parce que je me sens belle à travers ses yeux quand il me regarde. Le corps reprend une autre dimension, il ne sert plus juste à fonctionner pour soi, il le fait pour deux. En prenant soin de lui, pour soi comme pour l’autre. C’est comme s’illuminer de l’intérieur. Je fais des muffins à 2h du mat’ pour lui faire plaisir le lendemain. Je surmonte certaines de mes angoisses, telle ma phobie de vomir, parce que je m’en voudrais de me gâcher ce plaisir de manger avec eux ailleurs que chez moi à cause de ça et perdre l’occasion d’être ensemble. Je me surprends moi-même j’avoue sur certaines choses. Manger avec quelqu’un n’est pas forcément simple pour moi, je mange très lentement parce que ça me fait mal à la mâchoire de mâcher mais avec sa patience, je trouve convivial de manger ensemble et je reprends goût à partager des repas avec d’autres personnes que ma famille qui est habituée à ma lenteur.

C’est se sentir proche de lui au point que ce qui est compliqué parfois pour moi seule, devient plus facile à deux ou à quatre quand les petites sont présentes. Se sentir proche au point de lui dire que malgré toutes les salissures et mon corps pas en forme, duquel je pourrais être honteuse tellement il n’a plus beaucoup de muscles, des os apparents à certains endroits à côté de certaines malformations de mon dos et des marques un peu partout d’un passé alimentaire difficile à perdre, reprendre, reperdre, rereprendre du poids, j’ai confiance en lui. Un corps qui n’a pas non plus beaucoup de forces pour se mouvoir. Lui avouer mes appréhensions, mes angoisses, mes doutes au moment où d’autres étapes seront encore franchies (si j’arrive à les franchir). C’est avoir envie de prendre soin de lui aussi par rapport à son histoire, comme il prend soin de moi avec la mienne. C’est également avoir envie de protéger ses enfants pour ne pas brusquer les choses et prendre le temps pour qu’elles s’habituent à moi. Trois personnes en même temps à apprendre à connaître, à apprivoiser, à comprendre. Moi qui ne suis pas maman, qui ne sais pas faire en plus et qui ai déjà du mal avec une personne. Et pourtant j’aime avancer à leurs côtés. Même si je le fais en marchant comme sur du coton.

C’est aussi avoir peur. S’apercevoir qu’un attachement naturel se produit de son côté pour lui bien sûr, mais aussi pour ses deux filles et anticiper en se disant que si ça ne marche pas entre nous, je perdrai alors trois personnes d’un coup et mon manque de confiance en moi me fait douter sur ce que j’ai à apporter et à donner et entraînent ces questions bien légitimes. Alors on avance pas à pas. Profiter de chaque minute que j’ai la chance de passer seule avec lui, sentir son corps contre le mien, me rendre compte que mon corps est crispé à cause des douleurs qui sont fortes mais que j’essaie d’oublier quand je suis contre lui et qu’il me serre très fort comme s’il souhaitait réparer les miettes en refaisant un morceau intégral de cette enveloppe corporelle qui éprouve encore de l’attirance et du désir. Un corps que j’ai voulu tuer, mais qui résiste à la vie et qui m’envoie des signaux qu’il veut vivre des sensations comme si demain tout pouvait s’arrêter en moi. 

J’avoue que j’ai des petits anges gardiens qui ont compté et qui comptent encore aujourd’hui auxquels je pense parce qu’ils avaient/ont une philosophie de vie qui m’est utile en ce moment. Je sais qu’ils me diraient de vivre pleinement chaque instant comme si la vie pouvait se stopper demain comme ça été le cas pour certains. Il y a un lâcher prise parfois du fait d’avoir ce type de pensées et puis parfois quand les douleurs sont plus compliquées à gérer et que le moral prend de sales coups ou que les souvenirs viennent me serrer la gorge et pas qu’elle…, je veux reculer. Je calcule chaque geste pour que ça n’entraîne pas un inconfort pour moi mais pour que ça aille aussi pour lui. Lui dire que je préfère qu’il me tienne la main droite pour pouvoir l’entourer de mon bras gauche bien plus utile parce que l’inverse n’apporte pas grand chose vue ma grande mobilité à droite. Faire attention à ne pas me massacrer davantage tout en profitant. Je ne suis pas sûre d’y arriver. J’ai peur de fuir en m’apercevant que je ne parviens pas à aller plus loin. J’aurai honte que mon corps ne soit bon à rien dans des moments plus intimes et la dernière fois que c’est arrivé, je me suis renfermée sur moi-même, avec pour seule compagnie le souvenir de celui qui m’a salie et tout massacré au passage, parce que je savais que je n’étais pas réparée. Et je ne le suis toujours pas, alors j’ai peur de le perdre. Et si j’ai peur de le perdre, ça veut dire que je suis déjà attachée. Du coup il m’est arrivé d’avoir des gros moins bien ces jours-çi parce que je me tourmentais. J’essaie de parler au maximum pour qu’il comprenne et ne soit pas surpris si j’ai des réactions brusques et qu’une partie de moi aura le réflexe de le rejeter alors que l’autre partie aura envie de l’attirer, mais que ce ne sera  pas lié à lui. De la douceur pour réparer les salissures et de la douceur pour ne pas finir en mode Ikéa, en kits complètement décomposés où il manquerait en plus des vis et des boulons. 

Ce week-end, je sortirai encore plus de ma zone de confort, ça c’est sûr, parce qu’on ne peut pas dire que je sois simple dans le domaine. Mon caractère paraît facile apparemment, mais physiquement je suis un sacré cas ^^ 

Ca m’a fait du bien de parler à deux amies de mes difficultés, de mes inaptitudes aussi sûrement et les conséquences. Elles se reconnaîtront et je vous remercie d’être là ❤ Promis je profite de chaque instant que la vie me permet de vivre (sans me poser 1000 questions à la seconde) en l’ayant mis sur mon chemin, là où je ne l’attendais pas. Ni à cet endroit, ni à ce moment. Comme quoi la vie est étrange, surprenante, angoissante, belle, douloureuse et au milieu il faut se frayer son petit chemin pour piocher du bonheur là où il est, en évitant de passer à côté au maximum. Ne pas avoir de regrets étant le credo le plus important pour moi à l’heure actuelle.

Moments de bonheurs et d'évasion

Le mystère de l’instant présent peut-être résolu

Un de mes instants présents capturé début novembre. Plage du Prado, Marseille, Nov. 2017

J’ai toujours eu beaucoup de mal avec cette notion, parce que je suis plutôt énormément dans le passé et un petit peu dans le futur avec des difficultés à me projeter. Les seuls avec lesquels j’arrive sans doute le mieux à me persuader qu’il faut profiter de chaque moment, ce sont mes parents. Plus ils vieillissent, plus cette notion s’imprime à leur égard. Mais je m’employais avant à le faire à tous les niveaux déjà, parce que je sais aussi que c’est la clé pour savourer les bons moments du quotidien que je vole pour me permettre de voir le positif dans le négatif. Tout en n’ayant pas l’impression de le faire suffisamment pourtant. Je l’ai du moins compris ce soir-là, du moins d’octobre. 

J’étais allongée à cause des douleurs. Depuis mon lit, j’ai vue sur un bout du soleil qui se couche. Le ciel était rouge et les couleurs reflétaient dans mes vitres. Il suffisait que je me lève pour aller le voir sur mon balcon, sauf que j’étais mal en point. Au point où me déshabiller juste pour aller aux toilettes représente déjà un effort qui me donne la sensation que toutes mes articulations vont me lâcher en même temps et que mes muscles, mes tendons et mes ligaments vont s’arracher. Bref je me suis dit que le lendemain, le soleil se coucherait tout autant et que j’en profiterais à ce moment là. Et c’est là que j’ai pensé que bien sûr il se coucherait de nouveau, mais peut-être pas dans ce rouge vif s’il faisait moins beau. Et puis les nuages ne seraient pas placés de la même façon non plus. Et puis tous les couchers de soleil sont uniques, celui-là était magnifique encore un peu plus. Et j’ai eu un temps d’angoisse. J’allais le rater pour ne jamais le revoir, c’était nul… Le temps que je me relève et décrasse mes vieux os, le rouge avait un peu disparu, mais je suis restée là un moment avec mon appareil photo, à kidnapper cet instant présent justement, parce qu’il ne se renouvellerait pas et à essayer de faire en sorte que mes yeux mémorisent chaque détail. C’est ce soir-là que j’ai réalisé ce que signifiait réellement l’instant présent. Etre là, sans penser ni à demain, ni à hier. Quelques minutes éphémères où le temps semble s’arrêter.

Depuis, j’ai essayé de consolider cette sensation pour bien m’en imprégner parce que je sais qu’au stade où j’en suis, chaque détail de la vie compte pour que j’arrive à m’y accrocher (la dépression s’est de nouveau installée plus longuement et les idées noires aussi, c’était d’autant plus dur sûrement, en plus des douleurs, de me faire entendre cette notion de carpe diem maintenant). Puis à chaque sortie faite, même si elles n’ont pas été nombreuses, j’ai été attentive à tout ce qui avait autour de moi, en ayant en tête que si je revenais le lendemain, ce ne serait déjà plus pareil. La nature est le meilleur moyen de s’apercevoir de tout ça finalement. Les feuilles qui étaient là hier ne sont plus sur les arbres aujourd’hui. Certaines couleurs présentes quand il y a des nuages disparaissent quand le soleil est là et inversement et donc c’est important de voir les modifications. C’est devenu une obsession de me dire « est-ce que j’ai assez profité de ce que voyaient mes yeux et ce qu’enregistrait mon cerveau ? » J’ai été capable de m’angoisser pour certaines choses, en me voyant mal physiquement, en ayant la notion que chaque moment passait et qu’en même temps mon cerveau était lui-même un peu à la dérive et ça faisait un mélange douteux… C’est passé rapidement, mais la notion d’instant présent est davantage ancrée, même si parfois mon ras le bol de tout, la diminue, mais au lieu de m’angoisser de ne pas arriver à saisir ce temps là, j’accepte que souvent ces derniers temps, je suis à côté de la plaque pour tout et pour tout le monde et que je suis comme beaucoup, je fais de mon mieux. Et que j’ai un peu de mal à me relever, il faut bien le dire… c’était d’autant plus étrange que je comprenne mieux ce qu’on entendait par instant présent, comme si j’avais tenté de le faire en toute conscience et que finalement c’était mon subconscient qui m’avait permis d’y arriver quelque part, parce que rien n’est jamais acquis. Dans quelques jours, j’aurai perdu cette notion de nouveau et peut-être qu’en fait les angoisses ressenties étaient celles-çi. Ne plus parvenir à comprendre ce machin de carpe diem à la noix. Tout ça en faisant une overdose de pensées positives, en parallèle en plus. Mais ça j’essaierai de l’expliquer une fois, parce que je n’arrive pas à poser de mots réels sur cette overdose que je recherche pourtant (j’ai déjà dit que j’étais bizarre et paradoxale ??)

Je partage avec vous des instants présents que j’ai vécus pleinement si on ne compte pas les couchers de soleil. Les feuilles et leurs couleur ou leurs absences du jour au lendemain. La mer déchaînée un jour à cause du mistral et tellement éteinte des jours après par l’absence de vent. Happy qui me fait rire avec sa façon d’être. Profiter d’une émission télé ou d’un film pour juste me concentrer sur ça sans laisser divaguer mon esprit un peu partout. Regarder les nuages en se disant qu’en 39 ans que je vis, ils n’ont jamais eu une seule fois la même forme, la même couleur et la même composition entre eux et que c’est incroyable quand on y pense. Surveiller chaque étoile quitte à me geler sur mon balcon. Allumer la couverture qu’il y a dans mon lit avant de me coucher le soir, pour qu’elle le réchauffe pendant que je prends l’air une dernière fois et que je cours me blottir dans les draps tout de suite après. Essayer de capter le moindre regard dans la rue qui me permette de me raccrocher. Voir cet homme que j’ai tellement l’habitude de voir par terre, les yeux s’ouvrir en grand parce que je lui ai rapporté un sandwich et une bière. Voir ses compagnons de route sagement assis contre lui, se lever pour me faire des câlins (j’ai horreur quand un chien me lèche, mais ça faisait partie de l’instant présent… eurk…) comme s’ils comprenaient que leur papa était content. Voir et écouter cette guitariste mettre du soleil encore davantage sur le Vieux-Port, avec son talent qui fait du bien aux oreilles et être présente juste au moment où un vieux monsieur qui fait de la peinture avec ses doigts tremblants et un genre de raclette et qui a l’habitude d’être là, vienne lui apporter une de ses magnifiques peintures avec un grand sourire.

Rien que pour ça d’ailleurs, ce matin, j’étais contente de m’être fait violence autant physiquement que moralement pour aller voir le marché de Noël. Que je n’ai pas vu parce que j’étais fatiguée d’être restée un peu trop debout à écouter et regarder et que je préférais rentrer avant qu’on me ramasse à la petite cuillère. Alors je me suis dit que demain je reviendrais, avec mon appareil photo pour kidnapper ces instants de vie uniques. Tellement uniques que demain, la même scène ne sera sans doute plus la même parce que l’un sera absent. Ou les deux. Le marché, lui, vu qu’il est là depuis des lustres, ne risque pas de s’échapper pour l’instant, sauf si un incendie venait à détruire les cabanes qui l’abritent… et voilà… j’aurais dû aller le voir quand même… (vous comprenez mieux pourquoi je me crée parfois des angoisses ??… bon c’est exagéré, mais je suis sûre que vous avez compris), mais il y aura d’autres choses qui capteront sans doute mon esprit pour pouvoir en parler de nouveau. Justement parce que c’était l’instant présent. Qui ne se reproduira plus et dont il fallait que je profite au maximum de ce que j’étais capable de faire à ce moment là. 

J’ai toujours profité de chaque moment que mon corps me permettait de vivre mais ces derniers temps c’est plus compliqué parce que je ne respire pas la forme, du coup c’est un peu comme si tout était amplifié quand je me retrouve dans des endroits que j’aime. Me retrouver face à moi-même pour faire le ménage complet en moi, être plus tolérante avec ce corps qui me fait mal, avec mes neurones qui créent des court-circuits au point de ne plus savoir où mon cerveau en est. 

« Et je cours, je me raccroche à la vie
Je me saoule avec le bruit
Des corps qui m’entourent… »

Je vous laisse avec cette jeune femme qui était sur le Vieux-Port, en espérant la recroiser, même si j’ai savouré chaque note comme si c’était justement la dernière fois que je la voyais.