Gestion du Covid

Angoisses et dépression durant le confinement

Avec la fibromyalgie, la dépression et les angoisses sont mes gros points faibles et pas des moindres durant cette période de confinement. J’en suis arrivée à faire une liste avec ce qui m’était recommandé de faire et ce qu’il valait mieux éviter. Au bout de 3 semaines il y a matière à savoir ce qui nous fait du bien et ce qui nous fait plus de mal. Je ne vais sûrement rien apprendre de plus mais voilà ma petite liste pour tenir le coup moralement (même si j’ai de gros coups de moins bien comme ces jours-çi, après avoir appris 3 décès, je me sens abattue. Ma liste est une très bonne copine de confinement donc. Celle-çi est évidemment personnelle, avec des activités que j’apprécie, mais j’espère que vous pourrez vous y retrouver si comme moi ce n’est pas simple à gérer en étant bloquée chez soi. Seule de surcroît. Beaucoup d’éléments ne sont pas si différents de ma vie habituelle en étant chez moi d’ailleurs.

Les choses à faire :

* prendre soin de nos proches même à distance, parce que si eux vont bien physiquement/moralement, nous on ira bien aussi. 

* prendre soin de soi en continuant à se doucher, s’habiller, s’hydrater, se chouchouter. C’est quelque chose qui peut paraître absurde mais qui a son importance à mes yeux. J’en ai lu plusieurs qui s’en moquaient de leur apparence durant le confinement « puisque personne ne nous voit pas ». Mais c’est pour soi qu’il faut le faire, pas pour les autres. En gros, certains se lavent juste parce qu’ils sont en contact d’autres gens et sinon ils zappent. Quant au pyjama, il donne un rythme à la journée. Je suis contente de me déshabiller et de retrouver le mien le soir pour différencier la journée de la nuit.

* faire son lit, nettoyer son petit chez soi, ranger au fur et à mesure ce que je déplace. Après se sentir bien avec son corps dont on prend soin, c’est tout aussi important de se sentir bien chez soi et je pense qu’on aurait tendance à se laisser aller à mettre nos affaires partout si on multiplie les activités. Sauf qu’à un moment donné on se retrouve avec un bazar qui nous en fait perdre nos bras et on laisse tomber au moment du grand rangement de printemps. La pagaille s’accumule et on ne s’y sent pas bien. On voit nos murs 24h/24, ce n’est pas le moment de le délaisser, sinon c’est comme si on se laissait aller nous-mêmes. Faire des activités dans un endroit rangé permet de prendre davantage de plaisir à faire, à mes yeux aussi, donc on a envie de faire davantage de choses, ce qui peut éviter le fameux ennui.

* avoir des activités. J’ai fait la liste de ce que j’aimais faire, un peu comme une boîte à outils que je sors quand je ne me sens pas au top. Je fouine dans ma liste pour savoir ce qui est le mieux adapté à mon ressenti du moment. Cela évite de cogiter sur ce qu’on aime faire au moment où l’angoisse est trop présente et qu’elle sature les autres pensées. Là c’est écrit, il suffit de dire « oui », « non » en lisant la petite liste. On peut y trouver lire, écrire, faire de la peinture, du dessin, cuisiner et chercher de nouvelles recettes (faire du pain aura été ma plus grande passion durant cette période), apprendre à coudre, fouiner des infos sur ce qui me passionne, faire du tri (en vue du déménagement il m’en reste à faire), regarder un film/une série, faire du yoga, de la méditation, une activité physique (oui on peut bouger en restant chez soi, j’en reparlerai dans le post en lien avec la fibromyalgie) ce qui fait du bien autant physiquement que moralement, trier des photos ce qui permet de se replonger dans des souvenirs, écouter de la musique et se faire des playlists ou découvrir de nouveaux artistes, faire du jardinage même si c’est dans 3 petites jardinières comme les miennes, ça me fait du bien de voir mes fleurs, de toucher la terre et d’en prendre soin. Regarder des vidéos sur youtube pour apprendre à faire de nouvelles choses et fouiner sur pinterest pour trouver toutes sortes d’idées de DIY, quitte à se découvrir de nouvelles passions par la même occasion. Jouer, de mon côté ça va être des jeux sur mon portable comme candy crush, les échecs, le scrabble, mario kart.. des jeux qui permettent de fixer son attention sur autre chose et de se changer les idées. 

* continuer les projets professionnels. Il y a 1 mois et demi environ j’ai décidé de me rafraîchir la mémoire côté comptabilité et informatique pour augmenter mes chances de retrouver un emploi à temps partiel et depuis la maison quand je serai sur Nantes. Je m’étais achetée 2 livres de compta dans lesquels je me replonge. Et je fais des exercices qu’on trouve sur différents sites concernant word et excel. Ma mémoire et ma concentration étant ce qu’elles sont, j’en profite pour les faire travailler. J’avais fait une formation en secrétariat médical aussi, c’est pareil je revois surtout le vocabulaire médical. Cela me prend 2-3h par jour selon comme je suis

* un truc très bête mais qui me fait peur quand je vois et lis certaines choses. Continuer de manger normalement. Je sais que le fait d’être confinée risque de nous faire prendre du poids, mais diminuer ses rations pour éviter de grossir peut aussi être source d’humeur en vrac et c’est là qu’on risque de se jeter sur tout et n’importe quoi si on ne mange pas suffisamment durant les repas, ce qui n’arrange pas le moral, de se voir grignoter à longueur de temps. De mon côté je ne me vois pas me priver de nourriture maintenant. Je mange sainement, fais des choses que j’aime (j’en reparlerai dans un post où je parlerai anorexie, boulimie, compulsions durant le confinement, parce que j’y ai beaucoup pensé aussi. Et je dirai ce qui peut me faire peur par rapport à tout que j’ai vécu par rapport à ce cauchemar là).

* avoir l’impression qu’en se couchant, on a tout de même fait quelque chose de la journée et qu’on peut se coucher satisfaite de ce qu’on a réussi à faire malgré le confinement. S’endormir enrichie de quelque chose, quelle que soit la source de cet enrichissement.

* rire… il y a des jours où c’est très compliqué. Mais youtube est encore mon copain pour regarder des humoristes qui vont m’aider à me forcer à rire un peu. 

* applaudir à 20h pour les soignants et toutes les personnes qui aident à notre confinement d’une façon ou d’une autre. C’est générer de l’énergie pour nous aussi que de se retrouver au milieu de cette vague d’applaudissements pour montrer notre solidarité. 

* profiter du calme… je vis dans une route très passante avec beaucoup de klaxons à longueur d’années et je me suis aperçue à quel point ce bruit quotidien et en permanence pouvait nuire à mon bien-être aussi. J’en ai pris conscience en entendant les oiseaux qui chantent à tue-tête et j’ai découvert que les clochers sonnaient… c’est le point le plus positif que je trouve au confinement d’ailleurs. 

* la Terre respire sans nous… et c’est aussi bon de le prendre comme du positif et y penser pour voir le confinement sous un autre angle. 

* noter tous les petits bonheurs du quotidien. Les fameux petits soleils comme je les appelais sur ma page facebook il y a un temps. Ils ne prendront jamais davantage sens que dans cette période aussi anxiogène et perturbante qu’en ce moment. Si on est capables de les écrire à l’heure actuelle, le jour où on retrouve le courant de notre vie, ils seront encore plus simples à remarquer, ces petits bonheurs auxquels s’accrocher. 

 

Les choses à éviter

* passer trop de temps à regarder les actualités et à être sur les réseaux sociaux. On y voit tout et n’importe quoi et c’est anxiogène surtout si comme moi l’insomnie guette chaque nuit, c’est le meilleur moment pour lire toutes sortes de trucs qui vont être gérés de façon encore plus compliquée dans l’obscurité et le silence de la nuit . Mais ne pas s’isoler non plus comme je suis en train de le faire au moment où j’écris ce post. C’est nécessaire de trouver un équilibre.

* s’ennuyer. Je crois que c’est le pire durant le confinement. Je ne connais pas forcément ce sentiment, j’ai peu de moments où je m’ennuie, je m’estime chanceuse du coup, mais je sais que c’est le cas de beaucoup. C’est sûr qu’au bout d’un moment, ce sont toujours les mêmes activités qui reviennent au cours des journées, mais elles donnent un rythme malgré tout aux jours qui passent.

* compter les jours passés et les jours restants… c’est le meilleur moment de ne pas en voir le bout. Et c’est le meilleur moment pour apprendre à vivre l’instant présent. A chaque jour suffit sa peine comme on dit. C’est une expression qui peut compter double dans de telles circonstances. Il peut y avoir beaucoup de décès à gérer d’un seul coup aussi vue l’hécatombe et de la peine il y en a et il y en aura. De près ou de loin, les émotions peuvent être décuplées. On avance un jour après l’autre en voyant ce qui arrive au fur et à mesure.

* le passé peut ressurgir. Des épreuves qu’on croyait ensevelies ou pire guéries, en route vers la résilience depuis longtemps, qui refont bizarrement surface. Personnellement, vus mes souvenirs, je sais que c’est lié à des personnes que j’ai connues et qui viennent de mourir. Tout est en lien avec la mort en tout cas et la peur que j’en ai depuis que je suis enfant. Pour m’éviter de m’étouffer dans la merde du passé qui s’associe au présent, j’écris ce que je sens remonter dans le but de m’en débarrasser au moins au niveau de mes pensées. Je libère mon cerveau de tout ce qui pourrait le polluer (ce qui n’empêche pas que j’arrive à ne plus y penser, ce serait trop simple, mais tout ce que je découvre, arrive à analyser, je préfère que ça ne tourne pas trop dans ma tête). Je conserve une trace pour pouvoir évoquer ces choses qui ne sont peut-être pas bien colmatées et que j’aurai besoin de travailler encore quand je pourrai reprendre le suivi psy, surtout quand je réalise que ce sont des schémas qui se répètent ou des modes de pensées inadaptés qui reviennent dans chaque relation et chaque situation et qui pourront perturber mon avenir. 

*  se culpabiliser de ne pas se sentir bien… le nombre de fois où j’ai lu et entendu « vous n’avez qu’à poser vos fesses sur votre canapé avec netflix, c’est pas compliqué ». Ce n’est pas simple pour autant parce qu’on a tous des ressentis qu’il faut gérer et on fait comme on peut. Ce genre de phrase ne se dit pas. C’est sûr que mon confinement est plus simple que le combat d’une infirmière qui part affronter la mort, mais ma santé mentale en prend un coup et je n’oublie pas ce que j’ai déjà traversé en matière de dépression avec les conséquences qu’elle a pu avoir. Cela peut être légitime que je m’inquiète de me retrouver coincée seule. 

Le confinement peut entraîner des décompensations psychiques, d’où ce post parce que je suis toujours sur un fil et j’ai senti que je pouvais glisser à nouveau dans une dépression et je dois gérer des crises d’angoisse plus fortes qu’à l’accoutumée comme à une certaine période de ma vie et je ne veux pas revivre tout ce bordel, alors je tente de prévenir plutôt qu’à devoir à guérir à la sortie du confinement. Je m’aperçois qu’il a des effets destructeurs sur moi, un peu comme un démon qui tourne en rond en disant « tu croyais t’être sortie de certaines choses, ben non, regarde c’est toujours là, tu l’avais juste enfoui et je profite que tu sois bien face à toi-même, bien confinée pour tout te rejeter à la gueule ! » Je n’avais jamais connu un tel phénomène pour être honnête, pourtant je pensais avoir fait le tour de mon cerveau brouillé par des pensées erronées depuis des lustres, mais là il fait fort… Le but étant de ne pas faire pénétrer complètement le démon en soi… J’ai écrit les grosses lignes mais je me rends compte qu’il y a des éléments à développer, ce que j’essaierai de faire et surtout comme pour tout ce qui est écrit sur mon blog, tout ce que j’ai évoqué me concerne. Comme d’habitude je partage ce que je ressens et les moyens que j’ai de gérer les conditions de vie actuelles.

Prenez soin de vous. Restez chez vous. Et on n’oublie pas que ce n’est pas le virus qui bouge, c’est nous. Plus on respecte le confinement, plus on contribue au déconfinement progressif. De toute cette période, de toutes ces angoisses, il en ressortira quelque chose de positif. 

 

Combats qui me touchent

Comment j’ai vécu la dépression

Pas beaucoup l’ont vu cette photo… 1 semaine après on m hospitalisait pendant 1 mois. C’était une période où les coups fusaient aussi, et que l’automutilation était quotidienne. Ce qui n’arrangeait rien… (sept 2007)

Je me rends compte avoir très peu parlé de mes sombres périodes de dépression, en dehors de celles vécues depuis que ce petit blog vit en tout cas, mais il y en a eu de nombreuses auparavant. Des dépressions légères, des profondes, des courtes, des longues, des sans hospitalisation, des avec hospitalisation, des avec idées noires voire suicidaires, des juste beaucoup de larmes. Dans tous les cas, il m’a fallu une aide extérieure, parce que je n’étais pas assez forte émotionnellement pour gérer, même si j’ai mis du temps en parallèle à accepter le mot dépression et ses conséquences sur mon esprit mais aussi sur mon corps. On oublie souvent que les deux fonctionnent ensemble. Si on ne soigne pas le corps, l’esprit va mal. Si on ne guérit pas l’esprit, le corps envoie des signaux de détresse en mode « oh qu’est ce qu’il devient Monsieur Cerveau, il ne semble pas aller super bien et je vais montrer que je suis solidaire, paf prends toi ça, tu t’occuperas peut-être mieux de nous 2 si on s’y met ensemble ! »

La première période date de mes 19 ans. J’étais tombée dans la boulimie, mon corps en manque se rebellait et me faisait avaler tout ce que mes mains trouvaient sur leur passage. Du sucre, du gras, tout ce que je m’interdisais durant la restriction. Le trouble borderline était à son apogée, mon visage et mon corps n’étaient qu’hématomes et trainées de sang sur mes poignets. Je prenais en plus un neuroleptique qui me faisait prendre du poids. En un mois, j’avais pris 5 kgs, on m’a réhospitalisée en urgence pour changer mon traitement. Je n’arriverais pas à savoir si c’était déjà la dépression qui faisait son bonhomme de chemin ou si c’était la dénutrition et le trouble qui entraînaient de telles conséquences psychologiques. J’ai été encore plus fragilisée par cette période de plusieurs mois dans tous les cas. Ce qui m’a « aidée » à aller mieux est que mon cerveau a choisi la route inverse de nouveau, l’anorexie et son contrôle. Mais c’était la 1ère fois où je sentais cette immense tristesse en moi, ce vide alors que je remplissais mon estomac à en vomir. L’envie de rien, juste bouffer comme une merde et un porc. A ce moment là je tenais un cahier avec le nombre de calories ingérées, le sport que je faisais pour me dépenser, le nombre de laxatifs ingurgités. Je ne compte pas le nombre de dessins de moi toute ronde que je faisais, avec des mots loin d’être bienveillants envers celle que j’étais. Une fois l’anorexie revenue, je me sentais mieux… ce n’était qu’un leurre bien évidemment…

J’ai eu d’autres périodes similaires où j’arrivais à dire que je n’étais plus pareille, mais bien incapable de mettre des mots dessus. 

Et puis il y a eu septembre 2007, où la dépression profonde a fait son apparition. J’étais une loque, je peinais à me lever le matin, me réfugiais dans le sommeil autant que je pouvais, et puis il a fallu que je remplisse un jour des documents administratifs parce que la sécurité sociale était en train de faire les démarches pour me mettre en invalidité. Tout devait se faire dans l’urgence parce que je m’y étais prise trop tard évidemment. Je me vois encore avec tous mes papiers de toutes sortes éparpillés sur ma table et les formulaires à remplir. Je pleurais dessus en m’apercevant ne plus réussir à compléter la partie d’état civil. En gros il fallait que je réfléchisse à comment je m’appelais et que je trouve la force de tout inscrire dans leurs cases. Depuis un moment je conservais tout mon traitement -que je ne prenais donc plus…- (pour rappel, ne jamais arrêter un médicament et encore moins plusieurs à la fois, seule, sans l’accord du médecin, c’est très dangereux), me suis retrouvée en décompensation psychique et j’admirais mon sachet rempli de pilules de toutes les couleurs. C’était ma sécurité d’être libre si je ne supportais plus ce vacarme dans ma tête, de tout avaler. Le sachet grossissait pendant que je maigrissais et n’étais plus que l’ombre de moi-même, à me foutre de tout, à avoir la sensation que je ne ressentais plus rien et paradoxalement à avoir l’impression que j’étais à fleur de peau et que tout me touchait. J’étais morte tout en étant vivante, même si prendre de l’air oppressait ma poitrine, parce que je souffrais de grosses crises d’angoisse qui laissaient un énorme poids sur mes côtes et arrachaient le plexus en passant. Je me regardais dans le miroir et me demandais qui était cette étrangère que j’avais devant moi. J’ai appris plus tard qu’il s’agissait de dépersonnalisation et de déréalisation. J’étais paniquée d’être devenue une incapable pour les choses banales du quotidien. C’est là que j’ai compris le calvaire d’une de mes compagnes de chambre dans la clinique où j’avais été quelques années auparavant. Elle dormait toute la journée, ne parlait que par bribes, pleurait, ne se lavait plus. Pendant ma propre période de descente en enfer, j’ai essayé de me souvenir ce qu’il ne fallait pas que je fasse, en gros. Je n’ai jamais arrêté de me doucher. Chaque douche était une victoire contre la maladie et sans doute un mieux-être pour moi même si je ne percevais plus rien de ce qui pouvait me faire du bien. J’ai toujours eu des vêtements propres sur moi aussi, je ne suis jamais restée en pyjama toute une journée, je savais que ça pourrait empirer les choses. Mais le reste, je n’avais aucun pouvoir. Je n’étais plus rien, j’avais un trou béant dans le coeur, au point de me demander si j’avais toujours de l’amour pour mes proches et me sentais monstrueuse de penser de telles choses. J’étais vide de toute substance, une ombre qui se traînait d’un coin à l’autre de son appart, à essayer de garder un contact avec les autres, même si je le perdais. Chaque geste m’épuisait et me laissait vide de tout ce qui faisait « moi » encore 2 mois auparavant. Je n’étais plus rien, à part une merde, un morceau de viande sans âme. Un corps rattaché à une tête par un fil tellement infime que plus aucun courant ne passait entre eux pour communiquer ensemble. Chaque partie de mon corps et de ma tête faisait sa vie dans son coin et j’étais au milieu, l’âme en peine, les yeux avec des larmes en continu. Le silence quand on me posait une question ou qu’on se trouvait en face de moi. Plus aucune capacité d’analyse, de compréhension et puis j’étais lasse de toute façon, il fallait juste me laisser tranquille. Qu’on me foute surtout la paix, c’était ma seule volonté s’il fallait en avoir au moins une, à ce moment là. La décision d’hospitalisation a été faite à la demande d’une tièrce personne, le médecin. Elle aura lutté contre moi pendant plusieurs séances pour m’expliquer que je ne pouvais pas rester comme ça. Je ne voulais pas, on va à l’hôpital quand on est malade et autant j’avais accepté que l’anorexie était une pathologie, autant la dépression me laissait de marbre, on me triturait chaque parcelle de mon esprit, mais sinon tout allait formidablement bien. Un soir, que mon meilleur ami de l’époque était venu, j’ai craqué, un sursaut de vie m’a habité un très court instant, mais assez pour récupérer mon sachet rempli de médicaments et lui donner en pleurs, en lui expliquant qu’il ne fallait pas me laisser avec. Il n’a jamais jugé, il n’était pas du genre à le faire de toute façon, aussi compliquées que pouvaient être les situations avec moi… 1 semaine après j’étais hospitalisée, chaque jour on me faisait couler une perfusion de valium assez fort en dosage mais pas trop pour que je puisse bouger encore et ça m’allait. Je dormais enfin et m’en donnais le droit et faisais des activités toutes les après-midi, je voyais une psychologue plusieurs fois dans la semaine. Au bout de 2 semaines, j’étais déjà plus reposée, ça n’avait pas arrangé le côté dépression, mais j’étais plus objective sur le sujet au moins.

J’en aurais d’autres des périodes comme ça, mais ce serait bien long et pas forcément utile. Mon message à travers ce post, est surtout de dire que peu importe la « gravité » d’une dépression, c’est important de demander de l’aide dès qu’on sent des symptômes qui pourraient y faire penser. Une dépression sèvère aurait pu être plus légère si par exemple une prise en charge avait eu lieu plus tôt. C’est pour ça que maintenant, j’essaie de le dire dès que je ressens que je pourrais me faire rattraper, parce que la dépression est quelque chose qui est devenu chronique avec le temps. Donc pour limiter les dégâts si déjà il faut qu’il y en ait, je n’ai plus honte depuis longtemps de dire « non ça ne va pas moralement, je n’arrive plus à « être » tout simplement. Prenez soin de vous et n’oubliez pas que demander de l’aide n’est pas une faiblesse, c’est au contraire une force. Avec l’automne, il y a toujours un risque plus grand aussi. Ce n’est pas à négliger non plus. Chaque personne se tournera vers ce qui sera le mieux adapté pour elle, mais l’essentiel est de le faire à temps. 

J’ai toujours appelé la dépression, le cancer de l’âme, parce qu’elle grignote et pourrit aussi chacune de nos cellules et on peut parfois lutter, mais parfois on n’a pas le temps de dire ouf, qu’elle est déjà bien installée et plus on la laisse prendre ses aises, plus elle s’éparpille en nous et plus on met du temps à sortir du gouffre dans lequel elle nous plonge. Evitez les personnes aussi qui au lieu de vous aider, vous noient encore plus. « Quand on veut on peut » est une phrase stupide dans ce domaine. Quand on est happées dans ce tourbillon sans fin, on ne veut plus rien et on peut encore moins… 

Et ne minimisez pas votre état. Il n’y a pas de petite souffrance, il y a des souffrances tout court… Parfois on a envie de relativiser sans doute, en se disant que ce n’est pas grand chose et c’est pourtant ce qui peut conduire à la perte de sa vie quand on la laisse s’enliser en nous, sans plus pouvoir faire grand chose pour s’en débarrasser. 

 

A Pierre… 13 ans fin août qu’il s’est suicidé durant une période dépressive (il était bipolaire). Je n’ai rien pu faire pour l’aider. Même les médecins l’ont vu s’éteindre. Il ne parlait plus, ne souriait plus, son regard devenait mortel de jour en jour. Ils l’ont laissé sortir, il avait sans doute donné le change quelques jours. Il s’est tiré une balle dans cette tête qui l’avait tant étouffé…  Je ne l’oublie pas, il a été mon pilier dans la clinique où j’ai été envoyée pour la 1ère fois à Marseille et était devenu un ami au fil du temps.