
Je vais avoir des difficultés encore à parler de famille recomposée. Pour moi-même qui ne suis pas à l’aise avec ce terme très large et par respect pour les filles de J. qui n’aiment pas ce terme quand j’y suis inclus, ce qui est normal.
J’ai rencontré J. en septembre 2017 grâce à la technologie, les flèches de Cupidon 2.0 ont fait péter nos écrans respectifs, mais lente comme je suis, on est ensemble depuis janvier 2018. 1 an et demi donc à ce jour, ce qui me permet d’avoir un certain recul face à la situation, même si on n’habite pas encore sous le même toit et que mon point de vue peut donc être faussé parce que je ne suis pas présente 24h/24 dans leurs vies.
Je l’ai su tout de suite qu’il avait deux filles, j’aurais pu couper court à notre conversation, mais hormis la question « où est la maman ? » que je n’osais pas encore demander alors que je savais qu’il avait la garde complète et que je sais qu’il faut un motif solide pour qu’on n’octroie pas la garde à la mère, je me suis posée des questions, et puis j’ai fini par demander. Il a raconté ce que j’avais à savoir. La peur étant que ses deux filles ne m’acceptent pas du tout. Je ne suis pas fille de parents divorcés qui auraient pu refaire leurs vies aussi et je ne connaissais pas cette sensation de « pièce rapportée » dans une famille déjà bien constituée et dont le noyau, leur papa, est déjà bien solide. Je me suis toujours sentie mise en valeur par lui vis à vis d’elles. Et tout c’est toujours fait naturellement, j’ai essayé de me frayer un chemin dans leur vie, puis dans leur tête, pour atteindre leur coeur au fil des mois. J’adore leurs sourires quand elles me voient arriver, nos rires pendant les séances de chatouilles, les petits chagrins à essuyer, la confiance à mettre en celle que je suis, sans trop prendre de place, parce que le but n’est pas que je donne la sensation de vouloir remplacer leur maman. Ce ne sera jamais mon intention. Je suis juste là pour les accompagner du mieux que je peux, leur apporter mon affection avec ma féminité, ma douceur, mon écoute.
J’aurai toujours peur de faire mal les choses. Je n’arrête pas de dire à J. « Si tu me vois faire ou dire quelque chose qui te paraît inadéquat, tu me le dis, pour que je me corrige » Je n’ai pas envie de provoquer de dégâts alors que j’essaie d’être présente pour elles. Je ne veux pas casser ce qu’elles ont construit avec leur père en imposant ma présence non plus. Le but c’est que chacun(e) trouve son équilibre dans ce nouveau quatuor où je n’ai pas tout à fait ma place, vu le côté intérim de la vie à 4 puisque je viens le samedi et repars le lundi matin.
Le plus dur et ce qui arrivera un jour, l’adolescence approchant doucement… elles me diront que je n’ai rien à dire et à tout moment, j’entends leurs petites voix qui me disent « t’es pas notre mère t’as rien à nous dire ». Je crois que mon coeur s’effriterait en 1000 petits bouts. C’est pourtant la réalité, mais je serais blessée de l’investissement, de l’énergie, du temps que je mets à créer un climat de confiance entre nous et j’aurais la sensation d’avoir échoué. Alors j’échouerai évidemment, je me suis déjà ratée sur certaines occasions et paf, je l’ai bien eu dans la tronche, mais j’essaie de prendre du recul. Je me rappelle à quel point ma présence est naturelle et à quel point aussi la plus petite surtout a été déçue le jour où on a dit que mon état ne me permettrait plus de faire certaines choses dans le quotidien avec elles. On a expliqué que dans l’appartement qui serait le nôtre le jour où on aménagera ensemble, toutes les affaires seront à ma portée de main sans que je sois obligée de faire des acrobaties pour attraper des choses en hauteur, mais la chronicité du problème a marqué la fin d’une sorte d’innocence qu’elles avaient avec moi. Elles espéraient sûrement bien plus et bien mieux avec une femme dans leur foyer. Je me rappelle que la plus petite avait dit que quand on serait ensemble, on pourrait inviter des copines à la maison. Elle a sûrement cru que c’était foutu comme idée, alors que je me donnerai toujours à fond pour qu’elles soient les plus épanouies possibles.
Mais je me rends compte que c’est comme une course où j’ai des points à marquer. Cartonner à Mario Kart pour leur montrer de quel bois se chauffe l’amie de leur papa ^^, rater le moins possible à manger et encore moins les gâteaux parce que c’est bien plus sacrilège que les haricots verts dont elles ne raffolent pas. Dans 10 jours on fait l’anniversaire de la plus petite qui aura 9 ans, chez J. Il y aura 3 copines. Au fond de moi, mon but est qu’elle se souvienne de cette journée et égoïstement, ce serait un point de marqué si les copines disaient que j’étais vraiment sympa comme amie de leur papa (ben quoi on a droit de rêver et de faire des souhaits même quand ce n’est pas notre anniversaire !) Bon je rigole, quoique… j’aurais le coeur gonflé de confiance en moi si ça pouvait arriver. Je ne dois pas me rater en tout cas. Les enfants se rappellent de tout…
Je me demande très souvent si je serai à la hauteur, mon chéri me rassure très souvent et sans son soutien, j’aurais peut-être fui la situation dès le début aussi. Si elles avaient été plus petites aussi, la peur m’aurait sûrement fait réfléchir à deux fois si je voulais vraiment entrer dans ce foyer tout fait et tenter de me percer un petit passage pour le rejoindre.
Le sujet restant le plus sensible est le côté affectif/éducation. J’ai beaucoup d’affection pour elles, mais je trouve que c’est difficile de savoir ce qu’on a droit de faire, pas faire, dire, pas dire pour ne pas casser le schéma familial malgré tout. Je n’oublie pas que je ne suis rien pour elles et je trouve déplacé donc de leur dire que je les aime, même si je leur faire comprendre différemment, mais sais que ce n’est pas pareil. On en a parlé une fois où J. me disait que si j’avais moi-même des enfants, il ne saurait pas forcément comment se comporter face à eux. Que je ne représente pas une autorité dont elles ont l’habitude encore, même si quand quelque chose ne va pas, je ne laisse pas passer pour me faire respecter, mais j’essaie de ma calquer à l’éducation que leur donne J. pour qu’on soit sur la même longueur d’ondes. Ce qui est positif, c’est qu’on a la même façon de voir les choses donc je ne suis pas en désaccord avec lui. Je le suis plus facilement que si je n’étais pas d’accord avec sa façon de faire. En même temps, qu’est ce qu’on a droit de dire quand les enfants ont déjà déjà 9 et 10 ans et demi pour ne pas les déstabiliser entre un papa qui continue son éducation et l’amie de celui-çi qui dit autre chose, voire l’inverse. Ce n’est jamais arrivé pour le moment mais ce n’est pas toujours évident de prendre sa place.
J’y tiens à ce quatuor qu’on forme peu à peu. On avance jour après jour, comme on peut avec ce qu’on a, les outils que la vie nous donne. La communication aussi, primordiale pour ne pas laisser les choses qui pourraient poser problème, s’envenimer. Valable pour notre couple et pour le côté « famille recomposée ». Et puis il faut que je me sépare de cette phrase « tu ne peux pas comprendre, tu n’a pas d’enfants », parce que ça ne m’aide pas à me sécuriser par rapport à ces deux brunettes. Bien sûr que je sais sans doute moins me conduire comme il faudrait du fait que je ne suis pas mère et n’ai donc aucune expérience avec les enfants, mais mon coeur est bien ouvert lui, j’ai un minimum de logique aussi et je dois apporter quelque chose à toute cette petite famille, sinon je n’y serais pas présente, je suppose. C’est que malgré l’imperfection, on arrive à construire quelque chose ensemble. Rome ne s’étant pas construite en un jour…
A partir de quand on peut parler de famille recomposée d’ailleurs, parce que c’est un terme qui m’est encore étranger. Je ne sais pas si c’est le fait de ne pas habiter avec eux encore ou si je ressens que c’est trop tôt pour l’employer.
Avez-vous constitué vous-mêmes une famille recomposée ? Votre intégration a été facile ? Vos témoignages sont les bienvenus 🙂
Ptite Delph imparfaite mais qui se donne du mal par amour pour son chéri et ses filles…