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« To the Bone » – Un autre regard sur l’anorexie

« Des gamins comme toi j’en rencontre tous les jours et vous êtes sans exception des putains de baratineurs… si tu continues sur cette voie là, un jour tu ne te réveilleras pas… et je ne vais pas m’occuper de toi si tu ne veux pas rester en vie »…

Hier soir, je suis tombée par hasard sur ce film et pour que j’en parle par ici, c’est qu’il a marqué mon esprit ayant vécu l’anorexie. 

Synopsis :

Après avoir tenté plusieurs hospitalisations pour se sortir de l’anorexie, Ellen, 20 ans, est prise en charge par un psychiatre aux méthodes moins conventionnelles que ses confrères et c’est ce qui fera peut-être la différence… ou pas. Il réunit dans une maison, Ellen et 6 autres jeunes filles et Luke qui se battent aussi contre les troubles alimentaires. Son but est de les aider à s’en sortir avec des méthodes qu’on ne rencontre pas partout, ça c’est sûr. Mais parfois c’est bien de sortir des sentiers battus pour arriver à quelque chose. Je ne vendrai pas la mèche évidemment, je vous laisse découvrir le destin de ces 7 personnes. Et si la vie ou la mort a été plus forte que son combat qui porte le nom d’enfer.

Ce que j’ai pensé :

C’est le genre de film où j’accroche immédiatement, où je pénètre dans le personnage principal (Ellen), peut-être parce que je m’y suis retrouvée parfois dans ce qu’elle dégage, pense et fait. Lily Collins qui tient le rôle et qui est la fille de Phil Collins est tellement habitée par son personnage qu’on oublie que c’est un film et j’ai souvent été projetée dans cette maison parmi les autres patients. Et en psychiatre, on a Keanu Reeves que j’étais étonnée de voir dans un tel rôle qu’il joue à la perfection. Un psy qui contrairement à beaucoup d’autres a conscience qu’il n’est pas un super héros qui va sauver tout le monde et qui reconnaît ses propres failles par les psys sont des êtres humains avant tout… oui oui…

Le scénario permet de rappeler que l’anorexie ou autres tcas n’est pas juste une histoire de nourriture. Que le mal est plus profond et qu’il n’a pas qu’une cause mais plusieurs. Et le principal étant que les patients ont les clés de leur destin mais que le psy ne pourra rien fait s’ils ne choisissent pas de vivre. A la 1ère consultation, il dit d’ailleurs clairement à Ellen qu’il ne l’aidera pas si elle ne choisit pas de vouloir en sortir et de vivre. Je pense que la phrase a pu choquer certains esprits.

De mon côté, j’ai eu l’équivalent de ces mêmes mots avant d’entrer dans le protocole de soins en endocrinologie à la Timone. Et je trouvais ça dur de me dire que si on voyait que je ne voulais pas m’en sortir, on laisserait tomber. En gros qu’on me laisserait mourir pour dire les choses crûment. Avec le temps et le recul, j’ai réalisé qu’effectivement on ne peut pas aider quelqu’un qui se laisse mourir et que même en gavant les personnes qui en souffrent, si le mode de pensée ne change pas, ça maintient juste le corps dans une survie (ce qui n’empêche pas la mort malgré tout) qui ne sert à rien si au moment de supprimer la nourriture par voie entérale, la personne reperd tout parce qu’elle ne supporte pas d’avoir pris le poids à travers les poches de nutrition. On ne peut pas sauver ceux qui ne veulent pas (vouloir pour ma part étant que la fameuse voix anorexique est plus forte que le reste), parce que les médecins donnent juste les outils, c’est à nous de les utiliser et d’apprendre à les manipuler. C’est comme si les médecins mettaient le contact sur une voiture pour aider au démarrage, mais si, nous, n’appuyons pas sur l’accélérateur, rien ne bouge.

J’ai trouvé ce film touchant, émouvant (j’ai pleuré plus d’une fois), plein d’espoir aussi, avec des touches d’humour et avec la peur au ventre aussi… parce qu’il rappelle aussi que l’anorexie est mortelle… Ce n’est pas un film édulcoré malgré la bonne ambiance qu’il règne entre les patients. A travers chacun d’eux, on retrouve en fait des traits des troubles alimentaires, ce qui donne un aperçu assez complet de ce qu’on peut vivre quand on est dedans mais sans rentrer dans les profondeurs. J’ai déjà vu des films plus crus qui montraient davantage l’enfer des tcas. Celui-çi peut paraître « léger » en dehors des moments où la mort se fait plus présente. On en oublie que la mort peut être l’issue de l’anorexie et je pense que le film est tourné volontairement de cette façon, pour tirer les patients (et ceux qui seraient dedans et qui le regardent) vers la vie. Pour montrer qu’elle peut aussi gagner même quand on n’en a plus l’espoir ou l’optimisme ou le courage… ou que justement cette voix est trop forte parce que malheureusement la volonté ne suffit pas non plus. Parfois c’est trop ancré.

Un hymne à la vie parce que les techniques du psy sont surtout tournées vers ce que peut offrir la vie pour faire oublier ce qui a pu conduire aux tcas et l’enfer auquel ils mènent. Montrer la vie dans toute sa beauté sans en oublier ses échecs, parce que son but n’est pas de dire que tout est rose et de mentir pour que les patients aillent mieux. Il est là, à accompagner ses patients mais les laissant la liberté de choisir si c’est la vie qui les attend ou la mort. Dit comme ça, on peut se demander quel genre de psy ça doit être du coup. Un psy que personnellement j’aurais apprécié d’avoir parce qu’il ne se contente pas des mots, ce qu’il évoque est concret et il y a de très belles scènes où on regarde l’écran avec le sourire l’air de dire « ah oui c’est chouette de vivre rien que pour ça ». Et on comprend que c’est ça qu’il veut leur démontrer. 

Et la dure réalité revient en pointillés jusqu’à ce qu’on se souvienne que même si l’anorexie n’est pas une histoire de juste manger pour aller mieux et que ce n’est pas la seule composante d’une thérapie, c’est tout de même le moteur pour pouvoir vivre… sinon on meurt… et il y a des moments en suspens entre vie et mort qui sont oppressants parce qu’on ne connaîtra pas l’issue jusqu’aux dernières minutes.

J’ai toujours ces difficultés à raconter les films et les livres et je pense que des thèmes aussi douloureux et délicats sont encore pires à faire ressentir… mais je pense qu’avec un autre film (« la détresse invisible ») sorti il y a des années, c’est le meilleur film que j’aie pu voir sur le sujet.

Est-ce que vous l’avez vu ou comptez le voir ? Si c’est le cas vous me direz ce que vous en avez perçu ?

9 réflexions au sujet de “« To the Bone » – Un autre regard sur l’anorexie”

    1. Il est sorti sur Netflix il y a 2 semaines apparemment seulement, mais je ne savais pas qu’il était prévu (il faut dire que je ne suis pas l’actualité ciné ^^), j’avais même un doute si c’était bien Keanu Reeves, c’est dire si j’ai vraiment juste regarder le synopsis avant de le voir. C’est en fouinant que je découvre des pépites finalement. Tu me diras ce que tu en penses si tu regardes 🙂 je l’ai trouvé sur le site de streaming voirfilms.info Hier soir j’ai regardé « Brain on Fire », impressionnant ce film aussi. Bisous ma belle, je pense à toi ❤

  1. Je l’ai vu, et j’étais très touchée, vraiment très touchée… la scène avec l’oeuvre d’art est très forte, tout comme certaines des séquences avec la jeune Ellen… bouleversant ❤

    1. Oui c’est la scène qui m’a marquée aussi entre autres. Je suis même revenue en arrière pour la revoir. Luke est tellement beau en dansant sous cette lumière et ça respire effectivement la vie… Elle joue bien son rôle. Tellement bien que je me suis demandée si elle n’avait pas été elle-même anorexique pour le coup. Je ne la connaissais pas comme actrice, c’est une belle découverte. Bisous ma Julie ❤

  2. Je vais l’ajouter à ma liste alors 🙂

    Je suis également convaincue qu’on ne peut pas aider les personnes qui ne veulent pas s’en sortir. Pour avoir souvent été du côté de ceux qui tendent la main mais qu’on ne saisit jamais vraiment, je sais que je ne peux rien si la personne n’a pas la moindre volonté d’aller mieux. Tous ces cheminements sont de toute façon très personnels.

    1. Il a été retiré des plateformes de streaming oui entretemps. C’est bien dosé c’est clair. Le film a été écrit avec des personnes qui souffrent d’anorexie et certains acteurs le sont réellement aussi du coup ça donne une autre dimension au film et on s’y retrouve sûrement davantage aussi que si c’était des personnes qui n’avaient jamais vécu les tca de près

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